Philippe Piguet

Catalogue de l'exposition Acap-Fida, St Brieuc, novembre 1984.

 

" Dans l'évidence de ce qu'elle donne à voir, la peinture de J-Y Le Bon réfère à la fresque. C'est dire assez l'importance que prête l'artiste à tout ce qui est d'un rapport au mur. Il déclare d'ailleurs lui-même : "La muralité, c'est la peinture majuscule."

" Cependant, Le Bon n'est pas un fresquiste, au sens historique de ce terme quand il désigne une technique. S'il anime volontiers son travail d'installations réalisées en fonction d'un lieu donné, le peintre réserve à la toile et au papier la part la plus importante de sa production.

" Eu égard à celui d'installation, le concept du tableau , objet autonome susceptible de déplacements, occupe ici une place extrême. La peinture se situe ainsi dans un écart, entre le pariétal et le tabulaire, et c'est précisément cet écart que J Y Le Bon tente de réduire."

Du fragment.

"Pour ce dont il est chargé, dans son essence même,le fragment constitue le vocable premier du langage plastique du peintre. Il est, au coeur même du travail, son leitmotiv formel. J-Y Le Bon invente ses propres fragments."

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"Sur le plan iconique, Le Bon use d'un vocabulaire de figures rudimentaires qui connotent des thèmes aussi archaïques que le portrait, le paysage, le baiser, le faune ou le joueur de flûte. De façon analogique, l'histoire de l'art est ici hasardées en éclats. Les "tendresses" du peintre pour telle image, pour tel détail d'un tableau, pour tel artiste modèle sont mises en jeu dans ses figures. Il n'est pas question cependant pour lui de proposer le moindre rébus, seulement d'aventurer la peinture avec elle-même."

De la clôture.

" Sur les fonds peints du mur ou de la toile, Le Bon organise ses éclats en composition abstraite, ordonnée selon les règles les plus strictes des vielles théories renaissantes. Les fragments s'ancrent au fond, avalent leur propre bordures, pour mieux rendre compte du pictural. Une telle pratique assure l'artiste de garder ses distances par rapport à toute éventuelle narration. Et comme pour s'assurer de tout échappement, de toute fuite, J-Y L e Bon achève en recouvrant d'un même geste, d'un même jus unificateur le champ de son exercice. Cette ultime opération de clôture fixe définitivement chaque instant de peinture."

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Philippe Piguet